L'assiette s'écrasa sur le sol, diffusant un son cristallin qui se perpétua pendant plusieurs secondes, le temps que tous les éclats s'immobilisent enfin sur le sol. La voix avait cessé de chanter et le battement s'atténuait petit à petit. Pendant une longue minute, il n'y eut plus un seul son, puis la porte s'ouvrit pour laisser passer une femme en longue robe blanche et rouge. Des ornements runiques ornaient chaque pans de tissus, dessinés dans une étrange peinture écarlate. La jeune femme avait attaché ses longs cheveux blonds en un chignon dont seules quelques mèches s'échappaient, elle était d'une terrifiante beauté. Ses yeux du rouge du sang semblaient avoir déteins sur ses lèvres carmins, ses doigts fins et délicats tapotaient nerveusement un livre massif orné d'une main stylisée, son regard perçant scrutait les ténèbres avec résolution.
-Qui est là ?Sa voix était douce, rassurante, chaude et tendre, mais son visage était impitoyable, dur, prêt à mordre et à déchirer de ses dents blanches.
-Cette assiette n'est pas tombée toute seule, je sais que vous êtes là.Elle se dirigea vers le coffre qui avait abruptement cessé de gémir et glissa un ongle contre sa serrure qui cliqueta aussitôt. Elle en sortit l'aubergiste, le tenant par le col comme s'il avait pesé autant qu'une simple feuille, rivant ses yeux dans le grand homme qui semblait à présent chiffonné, d'avoir passé tant de temps à l'intérieur.
-C'est toi ? Tu as trouvé un moyen d'appeler des renforts c'est ça ? Ta coopération t'as évité d'être là-bas avec eux (d'un signe de tête, elle désigna la porte entrouverte par laquelle elle était passée)
, mais cela ne veut pas dire que tu ne peux pas t'y retrouver si tu fais n'importe quoi à nouveau.-Non, souffla t-il, proprement terrifié.
J'ai rien fait. Rien fait du tout. Une longue minute passa pendant que la probable mage semblait disséquer de son regard impérieux le pauvre tavernier avant de le laisser retomber dans le coffre dans lequel il se roula comme un pauvre enfant apeuré. Les mains sur les hanches, la demoiselle à la robe blanche se retourna.
-C'est donc qu'il y a quelqu'un ici qui ne devrait pas être là. (Un sourire fendit son visage, le transformant en une parodie terrifiante de charognarde.)
Tu n'imagines même pas ce que je réserve aux fouineurs, l'intrus, moi, en revanche, j'ai hâte de te trouver pour te le montrer. Les sujets de cet expérience te plaindront une fois que j'en aurais finis avec toi !Ce disant, elle se mit à fouiller chaque recoin de la pièce, se rapprochant de plus en plus de l'endroit où se trouvait Orina. Deux échappatoires s'offraient pourtant encore à la petite fille. La porte entrebâillée qui ne laissait pas voir ce qu'il y avait à l'intérieur, et les escaliers glissant qui remontaient vers une hypothétique liberté. Comme pour parachever ce sinistre tableau, un hurlement de douleur masculin s'échappa de la pièce rituelle, faisant briller d'un désir malsain les yeux de la chanteuse.
-Écoutes ça, disait-elle au vide, à l'inconnu qui s'abritait dans la pièce,
seule la vraie souffrance peut être aussi poignante, aussi puissante. Et pourtant, tu n'as ici qu'un aperçus de ce qui t'arrivera. Tu veux savoir pourquoi ils ont aussi mal, misérable insecte ? Ils se font dévorer par la magie, consumés vivant avec une lenteur sans égale, annihilé par la puissance vitale du sort que j'utilise. Ce sort, une fois qu'il sera prêt, je le testerais sur toi. Je lâcherais ma toute nouvelle puissance, une addition de magie ancestrale et de magie du sang, sur ton corps et ton âme. J'absorberais tout ce que tu es, je ferais de toi une réserve de douleur et de souffrance !Elle laissa échapper un rire aigre, ne laissant plus aucun doute à sa proie. Elle était en train d'essayer de lui faire peur pour la pousser à commettre une faute, une faute qui lui serait fatale.