Poulpe et compagnie
La dégustation d’un paladin avait toujours quelque chose de satisfaisant. Ils ne brillaient pas par la qualité de leurs encéphales, mais ils n’avaient pas moins bon goût que les autres et il était toujours satisfaisant de voir l’exubérance de richesse et de piété réduit à néant par une décérébration qui leur allait ma foi fort bien.
Ykjrkltz n’avait jamais compris pourquoi on s’acharnait à créer des paladins pour les lui envoyer. Au bout d’un moment, ils devraient bien comprendre qu’il n’était pas un mort vivant et que ses attaques étaient psychiques et non magiques. Non, sur le beau plateau qui lui servait de table de jeu souterraine, la disposition des grottes lui donnait un avantage que même le grand Maître du Jeu, la seule divinité vraie d’un panthéon fantoche, n’avait pas anticipé. Si les autres avait besoin de faire un long détour pour le rejoindre, il était suffisamment proche pour les sentir arriver et semer la zizanie dans le groupe bien avant de les voir lui-même. Il lui suffisait d’envoyer quelques esclaves, comme des kobolds où des gobelins pour prendre un avantage sur ceux qui refusaient de fuir. Dieu merci, le maître du jeu était retord et ne faisait pas de quartier, ce qui lui avait permis de survivre jusque-là.
Bref, le paladin était arrivé jusqu’à lui, tandis que les autres, n’écoutant que leurs courages qui ne leur disaient rien s’enfuyaient à toutes jambes.
Il avait pris son temps pour l’immobiliser dans une semi-inconscience, le temps d’enlever son casque et de laisser ses tentacules faire leur ouvrage. Aujourd’hui, il ne partagerait pas sa nourriture. Mues par un instinct autonome, les tentacules agrippèrent le visage du paladin, et le tenant fermement commencèrent à explorer les oreilles, le nez et la bouche pour se frayer un chemin vers le cerveau. Si en théorie elles avaient la puissance requise pour perforer la boîte crânienne, il était souvent plus simple de passer par les orifices naturels. Il entra dans une communion d’esprit, absorbant la conscience du paladin et l’explorant avec son repas. Sans surprise, une vie vertueuse et un personnage parfait malgré un lourd passé. Aucune immagination. Classique.
Au milieu de son repas, une voix se fit entendre. C’était très inhabituel.
« Héraut, je vais t’enlever de ton monde pour t’envoyer à ton destin. Je suis la dame, Déesse de lumière de Bariande et j’ai besoin de toi pour venir me sauver. Viens à moi et tu seras récompensé de ma divine étreinte »
Des délires fanatiques… Vraiment… il n’a rien trouvé de mieux qu’un appel divin pour meubler. Lamentable. Je suppose qu’il va se téléporter pour éviter sa mo…
Une grande lumière avait enveloppé le duo, et lorsque l’Itilhid vit à nouveau, il était en plein milieu d’un champ. Sa proie toujours devant son visage jura intérieurement. Il avait été transporté là ou seul le maître du jeu sait en même temps que sa victime et de Cassiopée, son poulpe lévitant. Ses tentacules finirent prestement leur repas, puis lâchèrent l’homme qui s’affala au sol dans un bruit de quincaille. C’est seulement à ce moment qu’il vit devant lui un enfant, jusque là caché par son repas et sa petite taille.
« heuu, bonjour »
Lui transmit-il par télépathie alors que ses tentacules finissaient de nettoyer la cervelle qui gouttait sur leurs ventouses.